28.

Limon, lichen et libellule

Balthazar avait conduit Ambre et Tobias dans un petit hangar jouxtant son échoppe.

— Voilà, c’est là que j’entrepose le surplus, les commandes spéciales et tout ce que je n’ai pas la place d’exposer en boutique, dit-il.

— Où est-ce que vous trouvez tout cela ? demanda Tobias en contemplant les matelas, meubles, et toutes les caisses pleines de souvenirs de la vie avant la Tempête.

— J’ai mes petits secrets, confia-t-il mystérieusement. Alors, de quoi auriez-vous besoin ?

— D’un moyen de traverser le fleuve, exposa Ambre.

Balthazar tiqua.

— Le fleuve ? répéta-t-il avec une grimace comme si le mot même était désagréable. C’est dangereux ! Cette eau est pleine de choses visqueuses et redoutables !

— Tant pis, à moins que vous puissiez nous faire passer le pont ?

— Hélas non, depuis la capture de votre ami, les gardes ont été doublées et les soldats ne laissent plus rien passer sans une inspection attentive, encore plus aux abords du Ministère.

— Et si nous nous présentions comme des traîtres Pans ? proposa Tobias. Et on demande à rejoindre le Ministère pour nous faire accepter !

— Surtout pas ! objecta Balthazar. Vous seriez aussitôt escortés jusqu’au bâtiment pour y recevoir une batterie de tests, c’est presque un lavage de cerveau ! J’ai vu des adolescents dans votre genre y entrer pleins de doutes et ressortir prêts à égorger leurs anciens copains ! Vous y passeriez plusieurs jours et le navire du conseiller serait déjà loin quand vous en ressortiriez !

Balthazar s’enfonça entre de hautes étagères et fouilla longuement l’intérieur de grandes malles avant de revenir avec un morceau de caoutchouc jaune.

— C’est un bateau gonflable, dit-il, certes pas ce qui existe de mieux, c’est hélas tout ce que j’ai.

— Ce sera parfait, répondit Ambre en inspectant l’embarcation.

— Et une fois de l’autre côté ? demanda Tobias. Ça ne résout toujours pas le problème pour s’introduire à bord ! On ne fera pas dix mètres sur les quais avant d’être repérés ! Il n’y a aucune cachette !

— Les égouts, intervint Balthazar. Du fleuve, vous pouvez entrer dans les collecteurs principaux, il suffira de patauger jusqu’à trouver une grille proche du navire pour remonter, il y en a partout pour recueillir l’eau. Ils datent d’avant le Cataclysme, c’est le meilleur moyen.

Ambre se frotta les mains.

— Et voilà, Tobias, nous avons désormais un plan !

 

Des nuages noirs passèrent devant la lune, plongeant momentanément Ambre, Tobias et Balthazar dans l’obscurité.

Ils terminaient de remplir d’air le canot jaune à l’aide d’un gonfleur qui s’actionnait au pied. Tobias avait usé de sa célérité aussi souvent que Balthazar ne regardait pas dans sa direction pour accélérer l’opération. Une pellicule de sueur maculait le front du jeune garçon et il savoura la fraîcheur nocturne.

La nuit était déjà bien avancée, presque toutes les lumières de la ville étaient éteintes, mises à part les lanternes des gardes et les hautes fenêtres étroites au sommet de la grande tour où était arrimé le dirigeable.

— Qui est-ce, le Buveur d’Innocence ? s’informa Tobias en admirant l’ombre gigantesque de la méduse qui flottait au-dessus de l’ancienne université.

Balthazar se crispa.

— Vous avez eu affaire à lui ? demanda-t-il aussitôt d’un ton effrayé.

— Non, c’est juste que je suis curieux.

— Il n’y a rien à savoir sinon qu’il ne faut pas l’approcher.

— C’est un proche de la Reine ?

— Non, certainement pas, le Buveur d’Innocence ne travaille que pour lui-même. Il fait alliance parce que ça l’arrange, bien qu’il n’aime pas la Reine.

— Alors lui aussi a encore sa mémoire ? supposa Ambre.

— Je ne pense pas, mais il existe d’autres choses que la connaissance et la mémoire pour ne pas être une coquille vide.

— Comme quoi ?

Balthazar prit une profonde inspiration avant de répondre du bout des lèvres :

— La perversion. Un être rempli de vices n’est pas une enveloppe que l’on peut remplir aisément avec autre chose, ses vices prennent trop de place et sont tenaces. Le Buveur d’Innocence est de ce genre-là. Ne l’approchez pas !

Tobias insista, trop intrigué par cet étrange personnage qui possédait une tour si grande et un dirigeable aussi singulier :

— C’est un homme puissant, n’est-ce pas ? Comment fait-il s’il n’est pas au service de Malronce ?

— C’est un rat d’influence, il connaît tout le monde, rend des services, et lorsque vous lui êtes redevable, soyez sûr qu’il saura un jour vous faire payer en retour ! Quiconque a besoin de quelque chose qu’il n’obtient pas vient le voir et il trouve toujours un arrangement.

— Il pourrait libérer Matt pour nous ? demanda Ambre.

— Non ! s’écria Balthazar bien trop fort.

Les deux adolescents se jetèrent à terre et tous les trois attendirent une longue minute avant d’être assurés qu’aucune patrouille ne les avait entendus.

— Non, répéta Balthazar plus bas, le prix à payer serait bien trop élevé ! Et personne ne gagne jamais en définitive avec le Buveur d’Innocence.

Le canot était prêt, ils attendirent que la lune revienne et ensemble ils le lancèrent à l’eau en le gardant accroché par une cordelette.

— Encore une fois, je vous le dis : renoncez ! insista Balthazar. Vous êtes libres, vous pouvez encore quitter cette ville !

— Pas sans Matt, fit Tobias en s’engageant sur l’échelle à barreaux qui descendait au niveau du fleuve, trois mètres plus bas.

Ambre se posta devant le vieil homme :

— Je suis désolée pour le cambriolage de cette nuit. Merci pour votre aide. Je ne crois pas que nous nous reverrons.

Balthazar prit la main de la jeune fille entre les siennes.

— Si d’aventure vous avez besoin d’un lieu pour vous cacher, vous savez où me trouver. Bonne chance !

Une fois les deux Pans installés dans le canot, Balthazar leur lança la cordelette qui les maintenait à quai et ils saisirent les rames pour pagayer dans les eaux troubles du fleuve.

Une pellicule sombre et poisseuse ne tarda pas à recouvrir l’extrémité des rames, et Tobias constata que toute la surface du fleuve était recouverte d’un limon épais.

— Il ne doit pas y avoir beaucoup de poissons avec ce truc ! fit-il d’un air dégoûté.

— Seuls les plus gros et les plus résistants doivent survivre ! Pas un bon point pour nous.

Le courant était heureusement moins fort qu’ils ne l’avaient craint, et ils parvenaient à ne pas trop dériver. Ils s’étaient élancés du point le plus au nord en espérant atteindre l’autre berge avant d’être emportés au niveau du pont où ils craignaient d’être repérés par les gardes.

— Une fois que nous aurons récupéré Matt, on saute dans le canot et on se laisse porter par le courant jusqu’à la sortie de la ville, tout au sud ! exposa Tobias.

— Il faudra que ce soit avant le lever du jour ! Regarde, il y a des tours de vigies à l’entrée et à la sortie du fleuve dans la ville. Ils nous verront certainement passer et donneront l’alerte.

— Peux-tu soulever le canot ou au moins le faire aller plus vite avec ton altération ?

— C’est trop volumineux et surtout très lourd, au mieux je tiendrais sur quelques mètres, pas plus.

Tobias haussa les épaules.

— Alors tant pis, on improvisera !

De temps à autre de sinistres formes affleuraient la surface en émettant des bruits humides. Tobias préférait les ignorer.

Le vieux Balthazar se tenait encore dans l’ombre des façades, il les suivait du regard. Tobias eut un pincement au cœur en songeant à ce personnage atypique, à sa solitude. Et dire qu’à New York ils le prenaient pour un tyran…

Pendant vingt minutes ils pagayèrent le plus vite possible en direction de la terre ferme et lorsque le quai fut à portée de bras, Tobias se sentit nettement plus rassuré. Ils n’avaient affronté aucune attaque monstrueuse.

Avisant la bouche ronde d’un collecteur d’égout, Ambre se servit de sa rame comme d’un gouvernail pour les rapprocher de l’œil noir qui sourdait de la maçonnerie. Avec quelques figures d’équilibre ils parvinrent à se hisser à l’intérieur et Tobias trouva même un clou qui dépassait pour nouer la cordelette de leur embarcation.

Le garçon sortit son champignon lumineux de sa poche et le leva devant lui.

Le collecteur faisait deux mètres de diamètre et ses parois étaient couvertes d’un lichen vert et jaune qui ressemblait à une toison emmêlée.

— Ne pose pas tes mains là-dessus, avertit Ambre, un Long Marcheur m’a raconté une fois que certains lichens des souterrains sont devenus encore plus urticants que le pire des sumacs vénéneux !

Tobias s’écarta vivement des parois.

Ils n’étaient pas très bien armés pour une opération commando, songea-t-il. Il n’avait que son arc et son couteau de chasse et Ambre ne disposait probablement que d’un canif, c’était peu pour résister à des épées, des haches et des masses !

Avec notre altération, cela peut faire la différence, tenta-t-il de se rassurer.

Un résidu d’eau croupie stagnait au milieu du tunnel et, pour éviter tout contact avec le lichen, ils étaient obligés de marcher dedans, produisant des éclaboussures tout de même plus bruyantes que ce qu’ils auraient souhaité.

Un bourdonnement sourd résonna dans le réseau de galeries.

Puis il s’intensifia, et pendant un moment Tobias pensa même qu’il pouvait s’agir du métro avant que les vibrations se rapprochent assez pour qu’il n’ait plus aucun doute :

— C’est animal ! releva-t-il. Et ça vient droit sur nous !

Tout d’un coup, un nuage s’abattit sur eux, des centaines de créatures se jetèrent contre leur corps, s’agrippant à leurs cheveux ou leurs vêtements. Ambre agitait les bras, paniquée tandis que Tobias se protégeait la bouche et le nez de crainte que les bêtes n’entrent en lui.

Sous la lueur du champignon, il put détailler les insectes. Longs, munis de deux paires d’ailes… Des libellules ! C’est juste des libellules !

La nuée ne s’attarda pas sur eux et poursuivit sa route, à peine ralentie, pour jaillir à l’extérieur et disparaître au-dessus du fleuve.

Tobias rassura Ambre en lui expliquant que ce n’étaient que de grosses libellules, mais cela n’eut pas l’air de lui plaire davantage.

Ils prirent à gauche à la première bifurcation pour être certains de longer les quais et Tobias reprit confiance en apercevant des grilles tous les vingt-cinq mètres qui laissaient pénétrer un rayon de lune. Ils en comptèrent sept et décidèrent de grimper pour vérifier leur position.

Tobias poussa de toutes ses forces sur la trappe d’acier qui se souleva en tintant et il remonta doucement la tête.

Le navire du conseiller royal, le Charon, se dressait à seulement trente mètres.

Il redescendit et s’élança vers le puits d’accès suivant.

— Nous y sommes presque, déclara-t-il.

Ils se faufilèrent par la grille suivante à la surface. Ils n’avaient plus qu’une demi-douzaine de pas à parcourir pour atteindre la passerelle d’embarquement…

— Il y a un truc qui cloche, comprit Tobias aussitôt.

— Quoi donc ?

— La passerelle ! Elle n’est plus à quai !

Ils virent alors que les amarres étaient jetées, et les grandes voiles baissées.

— Ils partent ! s’alarma Tobias en se relevant.

Le navire s’éloignait lentement du quai.

Défiant toute prudence, Tobias se tenait debout à découvert, constatant avec la plus grande détresse que Matt leur échappait.

Il partait pour le Sud.

Dans les griffes de Malronce.

Autre-monde 2 - Malronce
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